Regard sur la Jeunesse

FESPACO 2023

Des étudiantes abandonnent les cours à la recherche de « petits jobs. »

Si le Festival Panafricain du Cinéma de Ouagadougou (FESPACO) est un cercle de rencontre et de prestations pour les artistes, il est pour certaines étudiantes et non les moindres une opportunité de « se faire un petit sou ».

Il n’est secret pour personne : les étudiants mènent une vie, pas enviable dans la ville de Ouagadougou. Ils concilient généralement études et « petits jobs » comme gagne-pain pour « tenir ». Si la plupart des étudiants font le « vigilat », les étudiantes, quant à elles, se livrent aux activités de aide-ménagère ou cousinière, et les périodes de manifestations sont toujours pour elles des occasions à « profiter ». Lankoandé Docassa, étudiante en troisième année de Lettre Moderne à l’Université Pr. Joseph Ki-zerbo fait partie de celles-là. 

Il est 10h et demie lorsque nous débarquons à la Maison du Peuple, située au centre-ville de Ouagadougou, côté ouest du rom-point des Nations Unies. Une foule hétéroclite, des stands à perte de vue, des jeunes filles qui couraient çà et là à la recherche de potentiels clients, des commerçants accueillant des visiteurs venant de partout, telle est l’ambiance qui nous a accueillis à la Maison du Peuple dès notre arrivée. Nous avons tenté deux fois de joindre Docassa au téléphone sans succès. Elle décroche enfin notre troisième coup de fils : « un instant s’il vous plait, je suis occupée d’abord » s’est-elle contentée de dire en raccrochant. Quelques minutes plus tard, elle se pointe devant nous. « On n’a vraiment pas le temps. » a-t-elle insisté de nouveau. Docassa est une aide-cousinière au FESPACO. À l’en croire, elle a laissé temporairement ses cours pour exercer ce métier car « la situation l’oblige ».

Les parents ne peuvent pas tout faire et elle pense qu’elle doit apprendre à s’envoler de ses propres ailes.

« Les parents souffrent aussi. Ils ne peuvent pas tout faire. C’est une manière pour moi de leur prêter un coup de main » a-t-elle dit.  Loin d’être une fierté pour elle, la brave demoiselle pense que la vie de Ouagadougou et du campus en particulier oblige les étudiants et étudiantes à avoir un pied dans les études et un pied dans les affaires. « C’est pas simple » regrette-t-elle. Selon elle, ces conditions de vie qui contraignent les étudiants à mener parallèlement des activités auront forcement des impacts négatifs sur le rendement universitaire. « Mais, on n’a pas le choix » a-t-elle conclu d’une voix pathétique.

« Si j’avais eu le choix, actuellement, je serais en classe pour suivre mes cours. »

 

Dabourgou Maϊmouna, une étudiante, deuxième année de Droit à l’Université Thomas Sankara

Après Lankoandé Docassa, nous avons aussi rencontré Dabourgou Maϊmouna, une étudiante, deuxième année de Droit à l’université Thomas Sankara. Elle est aussi aide-cousinière. Lorsque nous sommes arrivés, Elle était entourée d’une foule de clients qu’elle servait. Nous avons dû patienter pendant quelques minutes. Enfin, elle se présenta devant  nous. Elle dit également être venue au Festival à la recherche de « quelques petits jobs. » Visiblement épuisée, son front était couvert de quelques gouttes de sueur. « C’est ça la réalité ! Certains étudiants sont obligés de déserter les cours pour venir au Festival juste pour avoir quelque chose » a-t-elle constaté en jetant un regard vers ses potentiels clients. Quant à son cours, Maϊmouna pense qu’elle pourra se rattraper après le Festival. « Comme c’est une semaine, on essaie de faire avec, et ce sont des modules, on pourra se rattraper après » rassure-t-elle.

j’avais eu le choix, actuellement, je serais en classe pour suivre mes cours. Ce n’est pas un choix » nous a-t-elle confié.

« Je voulais aussi rester en classe pour suivre les cours comme mes camarades, mais… »

À la suite de Dabourgou Maϊmouna, nous avons aussi visité le stand de Dori Bamanou. Elle est étudiante en troisième année d’Histoire et archéologie à l’université Joseph Ki-zebo.  Tout comme nos précédentes interlocutrices, Bamanou dit être venue au Festival « pour le gombo. » elle précise qu’elle est venue aider une « tantie » à vendre des brochettes et espère recevoir quelque chose en retour.

Cependant, elle regrette d’avoir laissé les cours de la semaine pour prendre part au Festival, même si elle espère pouvoir se rattraper. « Présentement nous sommes en train de faire des cours. Il y a des cours que je ne vais pas suivre durant la semaine. Mais après je vais me rattraper » dit-elle avec optimisme. Elle pense que son absence au cours durant cette semaine n’aura pas « trop d’impact dans ses résultats ». « À l’université, il suffit de prendre les cours et t’y mettre pour valider comme les autres » s’est-elle encouragée. Cependant, Bamanou reconnait que l’idéal serait de rester en classe et suivre les cours comme les autres étudiants. « Je voulais aussi rester en classe pour suivre les cours comme mes camarades, mais les conditions ne sont pas les mêmes » regrette-t-elle.

Cette situation interpelle l’Etat et tous les acteurs du secteurs puisqu’une Nation ne peut envisager le développement en négligeant son éducation.

                                                                 Par Barnabé NAMOUNTOUGOU

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